NOTE 6
Kersten ne tenait pas davantage aux honneurs que voulait lui décerner Himmler. Il déployait toute son ingéniosité pour s’en défendre.
Un jour, Himmler offrit très sérieusement à Kersten de faire de lui un général dans les Waffen S.S. Cela faciliterait les voyages du docteur au front où le docteur était seul en civil. Kersten le remercia aussi sérieusement que Himmler avait fait la proposition. El il ajouta sans sourire :
— Je crois qu’il vaut mieux que je reste habillé comme je suis. Quand le peuple affamé verra un général S.S. aussi gros que moi, cela rejaillira sur tous les S.S. Ce sera une mauvaise réclame pour eux. Attendons la paix.
Une autre fois, lorsque Himmler se trouva en Finlande avec Kersten, il voulut lui donner une très haute décoration : la cravate du Ritter Kreutz (Croix de Chevalier) pour mérites de guerre.
— Je vous remercie infiniment, dit Kersten, mais c’est la guerre. Pourquoi perdre du temps à des histoires honorifiques ? De plus, je suis déjà Commandeur de la Bose Blanche finlandaise et mes compatriotes pourraient être vexés que j’accepte une décoration inférieure à celle-ci. Attendons un peu.
La troisième proposition fut la plus difficile à refuser. Himmler, cette fois-là, voulait donner à Kersten le titre de professeur allemand de Médecine sur un parchemin signé par Hitler lui-même. Kersten s’en tira en disant :
— Cela me rendrait vraiment très heureux et très fier. Mais en faisant cela, nous offenserions la Finlande. N’oubliez pas que j’y ai le titre de Medizinälrat. C’est un litre supérieur à celui de Professeur. Pour l’égaler, vous devriez me donner le grade de Super-Professeur.
— Mais ce titre n’existe pas chez nous, dit Himmler.
— Alors, tant pis, dit Kersten. Laissons les choses telles qu’elles sont.